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Subir ou créer l'avenir : comment les communautés de territoire peuvent se donner un avenir !


A Marcel !


Effondrement économique et désespérance des territoires : La fin du futur?

La géographe  Maryvonne Le Berre définit le territoire  « comme la portion de la surface terrestre, appropriée par un groupe social pour assurer sa reproduction et la satisfaction de ses besoins vitaux. C’est une entité spatiale, le lieu de vie du groupe, indissociable de ce dernier"(1992). L'ethnologue Marcel Mauss reprendrait certainement cette définition qui suggère de concevoir le territoire  comme "un fait social total" à la fois géographique, économique et culturel. 

Or c'est précisément ces deux dernières dimensions qui a ont été particulièrement bouleversées par la mondialisation ultralibérale des échanges particulièrement mal régulée, il faut bien l'admettre,  quant on analyse les externalités négatives qui ont été produites. 

Si les bouleversements économiques ont été bien identifiés à travers la destruction massive des emplois industriels (entre 1975 et 2017, le secteur serait passé d'environs 5 millions de salariés à 2,6 millions) on a encore peu exploré  l'impact d'une telle épreuve sur les consciences individuelles et la dynamique  des communautés humaines que constitue les territoires. 

En analysant certaines statistiques comme en s'immergeant dans de nombreux villes ou villages on constate que la mondialisation a eu des coûts cachés considérables pour les populations inscrites sur des territoires fortement impactés par la  désindustrialisation. 

Durant cette même période,en effet,  nous avons assisté à la montée inexorable du chômage de masse, de la précarité et de la pauvreté. Mais d'autres indicateurs, moins fréquentés,  méritent également d'être convoqués pour comprendre l'ampleur du problème sur les subjectivités:

Entre 1980 et 2008, par exemple, on constate une augmentation massive de la consommation des médicaments appartenant à la famille des psychotropes (Source Ameli  Medic ‘am 2004 - 2008): 
- Au niveau des anti-dépresseurs, on passe de    420 millions d'euros à 480 millions d'euros
- Au niveau des anti-psychotiques de 200 millions à 380 millions d'euros
- Au niveau  des anti-ulcéreux et anti-acides, de 100 millions d'euros à 750 millions d'euros 
 
 A ces chiffres qui témoignent d'une souffrance sociale évidente, il faudrait aussi associer d'autres indicateurs qui sont tout autant révélateurs du malaise social profond,  qui a suivi cette période comme :
- Le coût de la consommation des drogues dites licites (alcool, tabac) et illicites (Cannabis, cokaïne, etc..) qui s'élève à 250 milliards (Cf. Le Monde 2015)...
- L'augmentation du nombre des plaintes relevant de violence familiale (44% des plaintes!)
- La montée inexorable de l'abstentionnisme lors des votes démocratiques (51,36% lors des dernières législatives de 2017)

Concrètement pour les acteurs, cela se traduit par de la désespérance et une grande difficulté à se projeter dans le futur, comme si,  après la destruction du "compromis d'existence" qui structurait la société , ceux - ci se trouvaient dans un état de sidération  comparable à celui qu'on retrouve dans le vécu des grandes catastrophes. 

Libérer l'imagination créatrice dans les territoires :

Face la transformation si rapide des règles du jeu qui gouvernaient nos existences, la tentation est grande d'entretenir une nostalgie éternel du passé. On le constate aisément dans le temps des verbes utilisé dans les conversations ordinaires : c'est l'imparfait ! C'est une façon, sans doute, d'échapper à l'angoisse d'un devenir inimaginable. Car pour imaginer le futur, le réinventer, il faut déjà être conscient de la rupture dans laquelle le destin nous a placés. 

Ce qui était confortable dans le passé c'étaient que les identités étaient définies par les systèmes avec une certaine continuité. Mais la brutalité de l'histoire économique l'a aujourd'hui brisée. On connait avec Bleger et Sloterdijk les conséquences d'une défaillance du cadre. Quand les individus ne sont plus contenus, ils deviennent orphelins,...jusqu'à ce que la résilience puisse s'opérer. Celle - ci survient quand les acteurs sont à nouveau capable de réinventer un cadre plus adapté à la réalité des circonstances. Cette période qu'on appelle une transition peut - être parfois interminable.
 
Il aura en effet fallu près de 30 ans pour  voir émerger de nouvelles ressources cognitives  qui  permettent d'envisager, des alternatives pertinentes. Ces ressources se dissimulent encore sous des termes parfois exotiques comme agilité,  design thinking, makestorming, hacking, etc.. mais en réalité il s'agit bien des forces de l'imagination créatrice qui tentent de se frayer discrètement un chemin. De toutes part en effet, dans la société française, des personnes se réunissent, sous forme d'ateliers, de rencontres interactives, etc...pour tenter de réinventer un autre monde. 

La puissance dynamogénique d'un projet de territoire

Il y a une grande différence entre une communauté de destin et une communauté de desseins. La première subit l'histoire comme une fatalité alors que la seconde cherchera à créer l'Histoire en affrontant les circonstances. Dans le premier cas, les individus ont abdiqués et partent à la dérive puisqu'ils n'ont plus de buts tandis que dans le second ils se donnent une finalité. Le Destin renvoie a quelque chose d'inexorable, à la nuit et au chaos. Le destin place les individus dans une fatalité  que même les dieux ne  peuvent infléchir.

Face à la situation catastrophique à laquelle beaucoup de territoires sont encore confrontés, il devient essentiel d'adopter une attitude pro-active et volontariste. C'est précisément la fonction d'un projet de territoire.

Pour y parvenir, la première étape consiste à  restaurer dans un collectif la capacité à rêver. C'est le préalable à l'action. Le rêve est ce qui permet de réveiller le désir qui pourra se mettre ensuite au service d'une finalité concrète.

Il a aussi une fonction lorsqu'il est collectif c'est de rassembler les énergies éparpillées et parfois opposées. Il permet de construire un nouveau "bien commun" a défendre face à l'adversité, qu'elles que soient les différences entre les individus. 

C'est en construisant une vision partagée qu'une cité peut se rassembler et à nouveau entrer en lutte contre le néant et faire exister une nouvelle réalité.  

Pour construire de façon démocratique un projet de territoire, il faut une méthode rigoureuse

Voici, pour conclure, un exemple de protocole de travail à adapter aux spécificités d'une communauté  ayant le désir de travailler sur un projet de territoire fondé sur  l'esprit et les méthodes  d'une démarche de  démocratie participative ou mieux encore directe: 

1. Mobiliser des citoyens volontaires conscients de la nécessité de se donner une ambition pour l'avenir

2. Former un groupe de facilitateurs facilitatrices aux méthodes d'innovation participative

3. Organiser des "ateliers" permettant à chaque citoyen de s'exprimer sur ce qu'il souhaite et ne souhaite pas

4. Compléter si besoin par des sondages auprès de la population

5. Classer les idées par catégorie 

6. Constituer des groupes de travail par catégorie d'idées (Social, économique, Urbanisme, Sécurité, etc...) animés par un animateur facilitateur élu par le groupe

7. Mettre à la disposition des groupes de travail  un espace numérique permettant d'enrichir les débats (Forum de discussions, Logiciel d'idéation, etc...)

8. Organiser une restitution en assemblée générale

9. Formaliser l'ensemble des travaux sous la forme d'un manifeste résumant l'ambition partagée et projets d'actions prioritaires

10. Hiérarchiser les projets en fonction des moyens

11. Faire un suivi régulier des projets avec des outils de management visuel et réguler

12. Les facilitateurs ne sont pas pour donner leurs avis, pire pour imposer les leurs mais pour permettre l'expression de chaque participant au débat démocratique. 

Quand le conte de Perrault "La belle au bois dormant" parle de notre enfermement paradigmatique 

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